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L'athée et le pasteur (extrait n°3)

 

Suite et fin

 

On me téléphone un soir : » Accepteriez-vous de débattre avec un athée, sur notre radio » ? Je réponds oui sachant que toute ma soirée est déjà occupée par une réunion. Comment vais-je prendre la parole demain matin, en direct, ignorant quel est mon adversaire ?……Bon exercice, non ?

Jean Hoibian

 

« Soyez toujours prêts à rendre compte de l'espérance qui est en vous »

I Pierre 3.15

 

Extraits n°3 : entretien impromptu entre Eric Chams, se déclarant athée et Jean Hoibian, pasteur, réalisé le 29 août 1989 sur Radio-Paris.

 

Eric Chams : Que pensez-vous de ce mot de Nietzsche qui était d'origine protestante, dont le père était pasteur et qui lui même fit quelques études de théologie au début (mais il les a vite abandonnées) et qui disait : « Dieu est un mot bouche-trous, c'est-à-dire, chaque fois qu'on se pose une question à laquelle on ne peut pas répondre, on place en réponse Dieu qui, lui-même est une question. » ?

 

Jean Hoibian : Je pense que c'est une bonne façon de parler de Dieu. Je dirais que ce que l'Église a fait de pire, ce n' est pas d'utiliser Dieu un peu comme bouche-trou, c'est d'utiliser le mystère comme bouche-trou. Chaque fois que quelque chose ne peut être démontré, comme il y a un orgueil assez grand chez les théologiens, on vous dit : « c'est un mystère de Dieu ». Cela ne me satisfait absolument pas.

 

E.C. : Vous allez avoir des ennuis avec vos autorités si elles vous entendent dire que vous êtes d'accord avec les positions de Nietzsche sur Dieu !

 

Jean Hoibian : Mais non. Je suis d'accord avec cette formule que Dieu est utilisé comme bouche-trou et que c'est malhonnêteté de la part des croyants ou plutôt des théologiens de l'utiliser. Mais je vous dis tout de suite que je suis très à l'aise. Notre Église protestante n'est absolument pas une Église hiérarchisée.

 

E.C. : Il n'y a pas de pape du protestantisme ?

 

Jean Hoibian : Absolument pas. Lorsque l'on fait une comparaison entre les deux structures d'Église, on dessine pour la catholique une pyramide et on place en haut le pape, puis les archevêques, les évêques - puis on descend jusqu' au peuple qui est presque à plat ventre - c'est l'église caricaturale du Moyen Age mais c'est encore un peu la structure de l'Église catholique avec le pape qui tous les jours apparaît dans nos médias et ça, ça m'agace passablement !

 Et puis de l'autre côté vous avez une Église à structure horizontale, l'Église protestante, qui est une Église démocratique. Moi je n'ai pas d'ordres à recevoir de personne dans mon Église et je ne crains absolument pas de vous dire quoi que ce soit, y compris des bêtises - je ne suis pas à l'abri d'une erreur... Mais nous n'avons aucun compte à rendre à personne.

 

Yport avril 2011

 

E.C. : Vous êtes le seul maître dans votre Église ? Après Dieu quand même !

 

Jean Hoibian : Le protestant a sa conscience et sa conscience le relie à Dieu, et c'est vis-à-vis de Dieu que j'ai des comptes à rendre et qu'Il me pardonne si j'ai dit des âneries à son égard aujourd'hui - mais la structure autoritaire de l'Église, chez nous, ça n'existe pas, et heureusement - je suis beaucoup trop démocrate pour accepter...

...

 L'oecuménisme a été un grand espoir pour nous. Nous avons toujours trouvé ridicule de se battre entre orthodoxes, protestants et catholiques et depuis Jean XXIII on avait l'impression que les catholiques renonçaient à être les seuls tenants de la vérité et que les protestants faisaient des efforts pour comprendre certaines particularités du culte et du dogme catholique et on avançait dans un oecuménisme qui était très sympathique et fraternel - et ceci existe toujours sur le plan de la pratique sociale. Mais quand je vois, excusez-moi, les positions prises par le pape Jean-Paul II et les grands courants de foule qui se dégagent (retour au sacré, au rite, aux pèlerinages, au culte de la vierge Marie), excusez-moi, je suis triste. Je ne méprise pas cette foi mais je ne la comprends absolument pas.

 

E.C. : Qu'est-ce que vous pensez, en restant correct, de la vierge Marie ?

 

Jean Hoibian : Je pense que c'est une femme qui a mis au monde Jésus et comme j'ai le plus grand respect pour Jésus, je respecte sa mère - qui en plus de cela n'était pas prétentieuse, c'était une femme du peuple...

Elle faisait partie des « humbles d'Israël » et je ne vois pas pourquoi j'aurais le moindre ressentiment contre elle, mais de là à l'accepter comme une divinité, de là à l'adorer, de là à prétendre qu'elle a échappé au péché ou qu'elle a mis un enfant au monde en dehors des voies normales, c'est-à-dire de la sexualité, non ! Excusez-moi, je ne crois absolument pas ça.

 

E.C. : Et l'ange Gabriel ?

 

Jean Hoibian : Je considère que là encore c'est un langage poétique extraordinaire pour parler de quelque chose qui s'est produit. Cette femme a eu la grande souffrance d'avoir un fils qui a été, si vous voulez une espèce de militant politico-religieux, et qui est mort pour ses idées. N'importe quelle mère qui perd son fils, même si c'est pour un combat très noble, connaît une grande souffrance... C'est tout pour moi. Marie n'est rien de moins et rien de plus

 

E.C. : Et Joseph ?

 

Jean Hoibian : Joseph, c'est le père de Jésus, bien sûr - c'est tout à fait évident. Mais là je vais en choquer quelques-uns, mais je ne vois pas du tout...

 

E.C. : Et Dieu dans tout ça ? Il y a Joseph, il y a Marie ; en quoi il a besoin de Dieu, ce Jésus ?

 

Jean Hoibian : Eh bien, pourquoi est-ce que Dieu a suscité un Martin Luther King ?

 

E.C. : Ah bon. Alors il a suscité Jésus-Christ comme il a suscité Martin Luther King. Comme, à la limite, il a suscité mon humble personne pour être opposé à vous...

 

Jean Hoibian : C'est très comparable. En précisant toutefois que j'attribue à Jésus une place particulière qui me fait dire : il est « Fils de Dieu ». Nous sommes tous fils de Dieu. Mais votre vie comme la mienne est pleine de trous alors que la vie de Jésus a été totale ment parfaite.Il est le prototype d'une humanité nouvelle vers laquelle nous marchons.

J'ai le sentiment très sincère, très fort, que Christ me conduit, me parle, rectifie mon existence et par conséquent (je le dis sans honte) me pardonne mes âneries...

Puisqu'il existe dans mon esprit, c'est donc qu'il est vivant. Et puisque historiquement ce Jésus a été mort, voilà la preuve de la résurrection du Christ.

 

E.C. : Quand vous dites que le fait d'avoir Jésus dans la tête fait que Jésus est vivant, si j'ai un jour l'idée, l'hallucination d'être une plante verte fait que je suis une plante verte ?

 

Jean Hoibian : Mais non ! On ne peut pas dire n'importe quoi ! Il ne faut pas céder à ces élucubrations. Jésus est vivant dans ma vie, dans mon existence, dans le monde, au travail comme le levain dans la pâte. Vous savez, on a l'habitude de dire : « Jésus est présent incognito. »

 Un croyant c'est l'homme du merveilleux, un croyant c'est l'homme de la poésie, l'homme qui croit en l'incroyable, un croyant c'est l'homme du vide, du saut dans le vide.

Et d'ailleurs, pourquoi resterions-nous séparés athées et croyants, quand nous nous retrouvons, comme vous le voyez, sur des domaines communs ?

 

extrait n°1 - cliquez ici

extrait n°2 - cliquez ici

Tag(s) : #Foi
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